Atlas / 5. Les processus, enjeux et orientations thématiques / Les paysages du littoral
5. Les processus, enjeux et orientations thématiques
Introduction :
puissance des transformations des 70 dernières années
Les valeurs paysagères clefs de La Réunion
Les paysages de l'eau douce
Les paysages du littoral
Les paysages de nature
Les paysages agricoles
Les paysages de l'habitat
Les paysages des mobilités
Les paysages des énergies
Les paysages des activités et équipements
Synthèse : les enjeux majeurs de paysage
Les paysages du littoral
Processus
Les paysages des pentes extérieures de La Réunion, en dévalant « du sommet des montagnes au battant des lames », offrent généreusement de larges perspectives des cimes jusqu’à l’océan. Le paysage du littoral se définit ainsi bien au-delà du trait de côte, associant les pentes dans des emprises plus ou moins importantes en fonction des sites.
Cette continuité Hauts-Bas n’est pas que visuelle, elle est aussi fonctionnelle avec les pluies d’altitude qui alimentent les nappes littorales, et écologique avec les corridors que forment les ravines ; elle est aussi profondément constitutive des modes de vie des Réunionnais, qui trouvent des complémentarités indispensables entre littoral, mi-pentes et montagne : prendre le frais dans les Hauts ou le chaud sur les plages, pratiquer des sports et des loisirs variés entre montagne et mer, entre eau douce et eau salée, entre pitons et fonds sous-marins. Mais le gradient d’altitude est aussi en partie un gradient social, avec des logements moins chers en altitude, car moins ensoleillés et plus éloignés des services et emplois offerts en ville.
Un paysage naturellement évolutif
Le littoral, « zone de contact entre terre et mer » constitue un espace en perpétuelle mutation. Les côtes réunionnaises évoluent par érosion et sédimentation avec des différences très marquées notamment pour les côtes meubles et exposées à la houle océanique, aux cyclones et aux tempêtes tropicales. Les perspectives d’élévation rapide du niveau de la mer liées au changement climatique laissent craindre une fragilisation d’espaces littoraux, déjà contraints et un laps de temps insuffisant à l’adaptation des habitats naturels côtiers. La diversité géomorphologique du trait de côte de l’île illustre le théâtre de ces confrontations terre océan : les plages de sable blanc du lagon, le littoral rocheux de Saint-Philippe et de l’Enclos ; les plages de galets du Nord et de l’Est oscillant entre replats et falaise d’arrière-plage… Dans ces situations variées, des évolutions sont régulièrement visibles :
- Les plages de galets de Cambaie sont engraissées par les matériaux érodés déversés à l’embouchure de la Rivière des Galets.
- Vers le front de mer de Saint-Paul, la dynamique de houle favorise le dépôt de sables bruns basaltiques sur la plage.
- Les exceptionnelles plages d’olivine, comme celle de Piton Sainte-Rose ou de Saint-Philippe, apparaissent de façon éphémère au gré des aléas climatiques.
- Le recul du trait de côte est lisible sur les littoraux de Saint-Paul, Saint-Leu, Le Port, Saint-Pierre, Saint Joseph et Saint-André (L'analyse de différentes données depuis 1950 sur les parties du rivage où la vitesse de recul ou d'avancée du trait de côte a pu être mesurée montre que 23,5 % présentent un recul, observable surtout au niveau des rivages meubles sableux et des cordons littoraux (15,8 % sont en avancée et 60,7 % montrent une évolution non perceptible) (source : CEREMA, Dynamiques et évolution du littoral : synthèse des connaissances à La Réunion, 21 décembre 2020).
- Les roches noires issues des coulées récentes du volcan illustrent l’extension de la partie terrestre sur l’océan à Piton Sainte-Rose.
Des planèzes accueillantes concentrant la majorité de la population insulaire
Afin de favoriser le développement économique, agricole et touristique des départements ultramarins, l’État a fait évoluer par décret du 30 juin 1955, la domanialité des terrains compris dans la zone des 50 pas géométriques, passant d’un statut de domaine public à celui de domaine privé de l’État. Ce choix a contribué au développement de la côte et des maisons « pieds dans l’eau ».
À partir des années 1960, le rapport à l’espace est modifié et le littoral ouest évolue sous l’effet du développement touristique et de la croissance économique. Les villes de bord de mer deviennent attractives et captent une bonne partie des populations des Hauts. Sur les zones rétro-littorales, l’effet d’attraction se répercute comme à Saint-André, Saint-Benoît… Au-delà des pôles urbains, des quartiers résidentiels apparaissent et privatisent la bande littorale comme à Souris Blanche.
Une concentration des infrastructures, des équipements et des ouvrages sur le littoral
Des espaces littoraux de nature
devenus rares et précieux
Hors des villes, des sites naturels d’accueil du public sont aménagés. À L’Étang-Salé et à Saint-Paul, les forêts littorales sont gérées dans le cadre du DPM par l’ONF et bénéficient de reforestation et d’accueil léger du public. L’arrière-plage littorale de l’Hermitage bénéficie de réaménagement pour préserver la plage de l’érosion tout en intégrant l’attrait touristique et récréatif : restauration écologique des hauts de plage, liaisons douces, requalification de l’actuel schéma de circulation et de stationnement (disparition de 600 places de stationnement) ; restriction de la circulation motorisée (hors services et secours) et recul des voitures ; aménagement de zones de transition, de pôles d’accueil.
Enjeux
L’excessive attractivité des sites littoraux
Il a fallu l’invention du tourisme balnéaire pour que les paysages littoraux prennent toute leur attractivité. Né au XIXe siècle, il s’agit au départ d’un tourisme réservé à quelques favorisés qui viennent en villégiature à Saint-Gilles, jusqu’alors modeste village de pêcheurs sur la grande concession Desbassyns, et coupé de Saint-Paul par les falaises littorales du Cap Champagne et du Cap La Houssaye. C’est la route qui change la physionomie de Saint-Gilles, commencée par l’ingénieur Bonnin en 1863, à la fois depuis Saint-Paul et depuis Saint-Leu. Elle est suivie par le train, dont un premier tronçon est inauguré en 1882.
Aujourd’hui, le tourisme et les loisirs liés à la mer ont élargi leur spectre d’intérêt : baignade, mais aussi marche et vélo sur la côte, plongée et snorkeling, pêche à la ligne et pêche au gros, bateaux à fond de verre, surf, planche à voile et kite surf, sans oublier le rituel pique-nique. La crise requin a toutefois freiné les pratiques les plus exposées : surf, plongée sous-marine et jusqu’à la baignade. Le littoral attire non seulement les touristes mais l’ensemble de la population de l’île. Cet attrait se concentre principalement sur les plages baignables, rares dans l’île.
L’attractivité est devenue telle que la côte, notamment la côte ouest balnéaire, est victime de surfréquentation. Cela se traduit par des problèmes multiples de circulation et de stationnement des véhicules, de dégradation et de banalisation des espaces d’accueil, d’érosion des plages, de dégradation des fonds marins et lagonaires, de pollution. Les acquisitions par le Conservatoire des Espaces Littoraux et des Rivages Lacustres (CELR) et l’application de la Loi Littoral sont des outils mis en place à peu près à temps pour éviter une urbanisation massive des côtes.
En 2022, le Conservatoire du Littoral protège 1923 ha dont 89 % acquis. Cela correspond à 18 sites ; 50 ha ayant été acquis en 2019 sur la Ravine des Lataniers. La répartition des sites s’organise en 1418 ha de forêts, 223 ha d’espaces naturels littoraux, 215 ha de savane à Heteropogon et 67 ha de zone humide littorale (Etang du Gol). En 2021, les actions principales ont porté sur les travaux de restauration écologique à l’Etang du Gol, la restauration d’habitat littoraux en faveur du gecko vert de Manapany, la réouverture du paysage de Savane à Cap La Houssaye, la stratégie d’accompagnement de la fin des plantations life plus sur Massif de la Montagne Grande Chaloupe et la réhabilitation d’une aire de stationnement à Terre Rouge.
Quant à la Loi Littoral, elle a assez efficacement freiné le développement urbain littoral des trente dernières années, qui s’est reporté plus à l’intérieur des terres sur les pentes.
Malgré les protections engagées, les paysages littoraux s’abstraient difficilement de la présence du bâti, les pentes des planèzes étant propices à de vastes covisibilités.
Aussi les espaces littoraux proprement sauvages sont-ils rares et précieux sur une côte très densément habitée. Parmi les plages coralliennes, les plus fréquentées, seule celle de Grande Anse échappe à l’omniprésence du bâti ; le long du lagon de l’Ermitage-les-Bains, les filaos peuvent faire illusion et constituent de précieux espaces tampons entre le rivage et l’urbanisation balnéaire ; la plage noire de l’Etang-Salé-les-Bains, de belle ampleur, bénéficie de vrais espaces sauvages grâce à la forêt à laquelle elle s’adosse ; parmi les côtes rocheuses, seule celle de l’est échappe à la présence continue du bâti dans le paysage ; au nord-est, quelques précieux champs de canne parviennent encore à descendre jusqu’au rivage, constituant des coupures d’urbanisation indispensables ; enfin la savane du Cap La Houssaye, bien que coupée par la Route des Tamarins et mangée partiellement par des projets d’aménagement, offre de vastes espaces de respiration sur un littoral en partie déchargé du trafic de transit lié à la RN1.
Outre l’urbanisation, les paysages littoraux souffrent en certains points de privatisation, et presque partout de l’intense circulation des véhicules concentrés sur les routes littorales historiques que sont les RN 1 et RN2. Sur l’Ouest, des propositions illustrées ont été faites en ce sens des propositions illustrées ont été faites pour rendre la cote aux circulations douces, piétonnes et cyclables, dans le cadre de la charte paysagère du TCO (2007). La situation évolue doucement, avec notamment, en 2023, la Région Réunion qui finalise sur la RN1A, au droit de la pointe du Cap La Houssaye, des travaux de sécurisation et de création d’une piste cyclable bi-directionnelle, en prévoyant sur cette portion une circulation limitée à 50km/h.
L’érosion des plages coralliennes, l’érosion des terres et la pollution des étangs et lagons : dilapidation d’un capital vital en termes social et culturel, environnemental et économique
L'érosion des plages coralliennes
À La Réunion, les récifs coralliens sont présents principalement dans l’Ouest et Sud-Ouest de l’île, au niveau de la côte sous le vent. Environ 8 % du périmètre de l’île accueillent des formations coralliennes, avec notamment 25 km de plages de sable d’origine corallienne et dunes associés. Ils se répartissent de manière discontinue entre Saint-Paul et Petite Ile, avec un linéaire de plage corallienne principalement localisé sur Saint-Paul et Saint-Leu (secteur Saint-Gilles-les-Bains à Saint-Leu). Ces plages résultent d’un fonctionnement particulier, en lien avec le bon état des récifs coralliens (rechargement par érosion et sédimentation naturelle). Ces espaces littoraux concentrent aussi l’essentiel des activités touristiques et de loisirs du littoral réunionnais. Il en ressort une forte pression anthropique, en lien avec différents phénomènes : la sur-fréquentation, l’urbanisation de littoral en particulier des arrières-plages (murs de protection au bord des plages, urbanisation balnéaire, …), une dégradation du continuum terre-mer engendrant diverses pollutions, une dégradation de l’état de santé des récifs coralliens qui participe à l’érosion des plages.
Depuis plus de 20 ans, il ressort que 50% du littoral réunionnais souffre d’érosion côtière, en particulier au niveau des côtes sédimentaires (cordons sableux, galets). Alors que les plages vivent au rythme des érosions naturelles (recharge par les apports des récifs, décharge avec houle…), l’érosion anthropique entraîne un bilan négatif entre les apports et départ de sable, entraînant un déficit sédimentaire. Ces pressions sont diverses, telles que :
- L’extraction de sable non contrôlée, aujourd’hui interdite, mais qui a eu un effet direct sur le dégraissement des plages. Il subsiste occasionnellement des nettoyages de plages de matériaux naturels, qui sont pourtant proscrits.
- La dégradation des récifs coralliens, qui ne permet plus les apports sédimentaires rechargeant les plages. Cette dégradation est en lien avec la pollution : rejets divers, agriculture (produits chimiques, turbidité), imperméabilisation des surfaces (et donc rejets des eaux pluviales) …
- La présence d'aménagements côtiers est également un important facteur de perturbation et d'érosion. En effet, l'implantation d'ouvrages transversaux (digues, jetées de port, épis, etc.) ou en arrière-plage provoque un blocage des courant de dérive et/ou une mobilité des sédiments, pouvant entraîner l’érosion.
- La fréquentation massive par la population locale (évolution culturelle) et touristique, qui rend les plages bien plus fréquentées qu’il y a 40 ans. Cette fréquentation excessive altère la végétation littorale qui, ne fixant plus le sable, le rend plus mobile avec le vent ou les vagues, ce qui empêche donc la stabilisation de la plage.
L’urbanisation côtière de La Réunion a été partiellement réalisée directement sur les plages. Cet empiètement de l’urbanisation sur le domaine côtier affaiblit les stocks sableux qui n’entrent plus dans les échanges sédimentaires indispensables au maintien des estrans.
La mise en place d’ouvrages portuaires et d’équipements littoraux peut altérer et modifier la dérive littorale. Le transit des sédiments et l’hydrodynamique sont modifiés de manière significative.
L’état de santé du système récifal a tendance à se dégrader ces dernières années. Les pressions sont multiples : pollution d’origine agricole (engrais…), rejets divers (eaux usées et pluviales notamment), dégradation du bassin versant (augmentation de la turbidité ou apports sédimentaires dégradant les coraux), fréquentation excessive altérant le lagon (notamment le platier avec ses colonies coralliennes) … Avec la détérioration des récifs coralliens, s’engage une altération du fonctionnement sédimentaire des plages (moins de recharge en sable), créant une érosion côtière.
Les plantations de fixation des sables, notamment des filaos au XIXᵉ siècle, à l’Ermitage-les-Bains, la Saline-les-Bains, Saint-Leu, l’Etang-Salé-les-Bains, sont vieillissantes. Les arbres hauts perchés sur leur faisceau de racines à nu témoignent de façon spectaculaire de l’érosion des plages. Des dispositions plus adaptées de replantations anti-érosives voient le jour, faisant appel aux essences endémiques ou indigènes, réparties progressivement, depuis les herbacées ou rampantes jusqu’aux ligneux. Les travaux de restauration écologique de la plage de l’Ermitage-les-Bains entre 2019 et 2022 ont eu pour objectifs lutte contre l’érosion du haut de plage, la restauration de l’arrière-plage et le contrôle des espaces de promenade en restituant un espace de plus accessible et mieux valorisé.
L'altération du continuum terre-mer, avec érosion des terres et pollution des eaux littorales
L’agriculture est un secteur d’activité traditionnel pour La Réunion depuis la présence de l’homme au XVIIᵉ siècle. Les terres agricoles (culture ou jachère) occupent 42 421 ha, soit 16.6% de la surface de l’île (35% de la surface en dehors des espaces naturels protégés). Près de 55% des surfaces sont dédiées à la canne à sucre, 30% à l’élevage et 15% aux cultures diverses. Ces différentes pratiques sont susceptibles d’affecter le bassin versant, par l’intermédiaire de l’érosion, mais aussi par pollution chimique (engrais).
Par ailleurs, l’urbanisation et l’aménagement du territoire ont augmenté. Entre 1989 et 2003, la part de la surface urbanisée a été multipliée par 2 dans les bas, par 3 dans les mi-pentes et par 5,5 dans les hauts (source SDAGE –Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux- 2009). À l’heure actuelle, les espaces urbains occupent 29 919 ha, soit 11% du territoire (Agorah, 2016), avec un étalement principalement localisé dans les mi-pentes et le littoral. Cela entraîne une imperméabilisation croissante des sols, qui aggrave l’aléa inondation et génère des rejets importants (eaux pluviales notamment) et diverses pollutions indirectes. Les dispositifs mis en place (retenues, gestion des eaux usées ou pluviales…) apparaissent insuffisants.
Les pollutions d’origine agricole ne sont pas aussi importantes que sur certains bassins métropolitains mais leur augmentation est constante depuis quelques années.
Les eaux pluviales proviennent des ruissellements et rejets des zones imperméabilisées (milieu urbain, industriel, portuaire, routes…). Ces rejets peuvent notamment se charger de matières en suspension ou de certains polluants, participant à la dégradation de certains milieux naturels sensibles comme les zones humides, les récifs coralliens, les cours d’eau.
Les stations d’épuration tendent vers la saturation, ou certaines présentent des déficits en termes de traitements. Cela peut conduire à une dégradation des eaux rejetées.
Les rejets industriels peuvent contribuer à la saturation des stations d’épuration (cas des rejets des usines sucrières), et ne sont pas toujours conformes, ce qui peut donc créer différentes pollutions.
L’assainissement non collectif est moins important maintenant à La Réunion, mais concerne encore 48% des foyers réunionnais. Les traitements des eaux usées se sont améliorés, mais cela impacte certaines masses d’eau superficielle, comme au niveau de la Rivière des Pluies, Rivière Saint-Jean, Rivière du Mât ou Saint-Gilles-les-Bains (SDAGE, 2021).
L’érosion est aggravée par la suppression des andains sur les terres cultivées.
Ces différentes pressions entraînent un ensemble de pollutions qui peuvent affecter certains milieux naturels jugés sensibles, tels que les zones humides (notamment les étangs littoraux de Saint-Paul et du Gol, voire de Bois Rouge), ainsi que les récifs coralliens. Les masses d’eau côtière de type récifale souffrent grandement de ces pollutions, que ce soit chimique (nitrates, les phosphates, pesticides), l’érosion avec apport de matières en suspension et turbidité… Ainsi, en 2019, sur les 4 masses d’eau côtière de type récifale, 1 est en bon état et 3 sont dans un état moyen, témoignant d’une dégradation globale des récifs coralliens. De manière générale, les tendances évolutives mettent en évidence des risques d’augmentation de ces différentes pressions, que sont l’érosion, la pollution ou l’urbanisation (croissance démographique…). Pour limiter ces différentes pressions et préserver les milieux littoraux, des actions ont été mises en place, qui bonifient le paysage littoral :
- Mise en œuvre du Schéma de Mise en Valeur de la Mer (SMVM) au titre du Schéma d’Aménagement Régional (SAR) de La Réunion, répondant à trois grands objectifs : (I) protéger les écosystèmes littoraux, (II) organiser les activités littorales, (III) contenir le développement urbain.
- Révision et mise en œuvre du SDAGE (2022) et des SAGE (échelle plus localisée) pour la gestion durable des eaux. Ces outils de planification (loi sur l'eau de 1992) permettent ainsi une gestion équilibrée de la ressource en eau, en visant un bon état des masses d’eau.
- Actions diverses de l’Etat au niveau de la bande littoral dans les 50 pas géométriques pour limiter voire supprimer des aménagements illégaux ; Études sur la gestion durable du continuum terre-mer, en particulier au niveau de Saint-Leu (DEAL, BRGM).
- Présence de la Réserve naturelle nationale marine depuis 2007, qui s'étend sur 40 km de côtes du Cap La Houssaye à Saint-Paul, à la Roche-aux-oiseaux à L'Étang-Salé. La réserve couvre 35 km² et s'organise en trois types de zones : périmètre général, protection renforcée (45%) et protection intégrale (5%).
- Présence de la Réserve naturelle nationale de l'étang de Saint-Paul depuis 2008 (400 ha), zone humide d’intérêt international inscrite également à la Convention Ramsar.
- Acquisition et gestion de l’étang du Gol depuis 1987 par le Conservatoire du Littoral (30 ha).
- Étang de Bois Rouge, réserve naturelle volontaire depuis 1992 (propriété privée), pour 38 ha de zone humide (sur un total de 54 ha).
- Actions localisées de restauration des littoraux : cas de plantations littorales réalisées sur les plages de Saint-Leu et Saint-Paul en faveur des tortues marines (CEDTM, 2020), cas de la restauration de la plage de l’Ermitage à St-Paul avec plantations.
La dépréciation des paysages secs de l’ouest
Les paysages agricoles de canne, de vergers ou de maraîchage ne sont pas les seuls à pâtir du développement mal maîtrisé de l’île. Sur le littoral ouest, les paysages secs de savane tendent à disparaître, sous le triple phénomène de l’urbanisation, de l’irrigation et de l’abandon du pâturage. Si la forêt sèche à lataniers et à benjoin a disparu depuis longtemps, les étendues de savane, entretenues par le parcours des cabris ou des bœufs Moka et par le feu, sont en train de disparaître.
Elles ont d’ores et déjà laissé place à de vastes étendues de fourrés épineux peu attractifs sur le littoral (entre la Grande Ravine et Saint-Leu). Depuis les dernières décennies, l’urbanisation grignote le reste des étendues de savane, qui, ainsi fragmentées, se transforment en friches résiduelles peu avenantes et guère capables « d’absorber » le bâti nouveau. Le pâturage, contraint par les ruptures de continuités (qu’aggrave la route des Tamarins localement), abandonne les espaces trop difficiles à gérer. L’irrigation en cours conduit à substituer de façon spectaculaire de vertes étendues de canne aux fauves ondulations de savane. Celle-ci devrait se maintenir partiellement sur le Cap La Houssaye, où la route des Tamarins a été dessinée et plantée dans cette perspective, aménagée en « route de savane » : chaussées décalées et séparées pour ouvrir les vues, terrassements morphologiques reprenant les modelés naturels de la savane, création d’ouvrages d’art supplémentaires pour favoriser la perméabilité de la route et le passage des troupeaux, choix de palette végétale adaptée au contexte. Un morceau de savane est également protégé sur la Pointe au Sel.
La quasi-disparition de la savane est une perte pour l’île dans son ensemble. La savane contribue en effet à la diversité et aux contrastes des paysages, valeur première de La Réunion. Elle a été identifiée comme précieuse dès 1992 (Etude des espaces naturels et culturels remarquables du littoral de La Réunion, DDE/Folléa-Gautier) et le Cap La Houssaye protégé de ce fait dans le SAR 1994. Au-delà, elle mérite aujourd’hui une réhabilitation et un réaménagement en « parcs de savane », en faisant une place à la recréation de forêt sèche et savane arborée, d’autant que la population s’y avère sensible, fréquentant de plus en plus densément la savane du Cap La Houssaye depuis l’ouverture du chantier de la Route des Tamarins au milieu des années 2000.
Des réflexions sont menées par le Conservatoire du Littoral (CELRL) sur des expérimentations de brûlage dirigé pour contribuer à l’élimination des plantes envahissantes et notamment de faux mimosa (Leucaena Leucocephala)… Elles montrent que le feu seul ne peut rien, il faut qu’après lui et quand la végétation a suffisamment repoussé passe le bétail. Caprins et bovins maintiennent les ouvertures que le feu a ménagé ; consomment les jeunes pousses et aident à limiter l’expansion des arbres et des buissons. (Source Patrimoine Paysage sous le vent. Serge Briffaud 2019, article initialement paru dans « les Carnets du Paysages », Acte Sud, n°35). Face à la déprise pastorale de la filière (cheptel de 100 têtes de bœuf moka et de cabris avec peu d’éleveurs) et aux contraintes de brûlage en partenariat avec le SDIS, les expérimentations mécaniques sont en cours de mise en œuvre par un engin appelé « pieuvre » pour lutter contre les plantes invasives et la fermeture de la Savane.
Orientations
Protéger et valoriser les paysages naturels littoraux
Objectifs
- Éviter le continuum urbanisé d’une côte « à l’espagnole », préserver l’attractivité touristique du littoral.
- Stopper le processus de grignotage lent des coupures littorales et leur fragilisation.
- Garantir la succession agréable des villes et stations littorales distinctes les unes des autres, conforter leur identité.
- Organiser la gestion de la côte pour limiter sa surfréquentation.
- Mettre en valeur les paysages naturels du littoral.
- Offrir des espaces de nature, de respiration et de liberté au cœur d’un littoral de plus en plus urbanisé et habité.
- Valoriser le cadre de vie construit littoral.
- Réduire la place de la voiture au bénéfice des circulations douces et transports en commun.
- Garantir ou reconquérir une continuité naturelle/écologique le long du littoral et en limite de ravine (exutoires).
Principes
- Définir une vocation à chaque coupure d’urbanisation : un projet au-delà de la protection par la Loi Littoral, le SMVM et le SAR, qui valorise chacune au bénéfice de la population et de l’environnement.
- Inscrire les constructions nouvelles en retrait du trait de côte, éviter le durcissement des hauts de plage conduisant à l’érosion.
- Renforcer la vie et l’animation liées aux ports, conforter leur qualité paysagère à l’occasion des extensions ou des créations d’abris côtiers.
- Promouvoir la qualité paysagère, environnementale et architecturale des aménagements hydrauliques liés aux ravines sur le littoral (berges, bassins, épis, digues, ouvrages d’art…) : faire appel à des hommes de l’art pour leur conception et leur mise en œuvre (paysagistes, écologues, architectes...).
- Promouvoir la qualité paysagère et environnementale des aménagements de lutte contre l’érosion marine : faire appel à des hommes de l’art pour leur conception et leur mise en œuvre (paysagistes, écologues...).
- Reculer les stationnements par rapport au trait de côte.
- Développer le réseau des circulations douces (piétons, vélo, cheval), y compris en retrait du littoral.
- Diversifier progressivement les essences par séquence de littoral (renforcement de la diversité des ambiances et de la personnalité de chaque littoral).
- Inscrire les actions dans des plans de gestion incluant l’arrosage et la protection des jeunes plantations, la taille contre le risque de chutes de branches, le ramassage des déchets, le choix de nouvelles essences de reboisement.
- Sensibiliser et informer la population sur le littoral et sa fragilité.
- Revaloriser en particulier les paysages littoraux du nord-est (Sainte-Marie/Saint-Benoît), de Grands-Bois, de Saint-Pierre/Le Tampon – Pointe du Diable -, de Saint-Louis – étang du Gol-, de l’ouest – Pointe de Trois-Bassins/Pointe des Châteaux, de Saint-Denis.
- Organiser l’urbanisme et le paysage du coteau de Saint-Gilles/Souris Chaude (voir le Schéma intercommunal d’aménagement des lisières urbaines du TCO, agence Folléa-Gautier et Zone UP, 2009).
- Protéger et requalifier les paysages secs du littoral de l’Ouest : « Parcs » de savanes et forêts sèches (voir la Charte paysagère du TCO, agence Folléa-Gautier, 2008).
- Préserver et restaurer les espaces en faveur de la biodiversité dont les sites favorables à la ponte des tortues marines.