Atlas / 5. Les processus, enjeux et orientations thématiques / Les paysages de nature
5. Les processus, enjeux et orientations thématiques
Introduction :
puissance des transformations des 70 dernières années
Les valeurs paysagères clefs de La Réunion
Les paysages de l'eau douce
Les paysages du littoral
Les paysages de nature
Les paysages agricoles
Les paysages de l'habitat
Les paysages des mobilités
Les paysages des énergies
Les paysages des activités et équipements
Synthèse : les enjeux majeurs de paysage
Les paysages
de nature
Processus
Les paysages de nature : essor du tourisme et de la fréquentation
Le développement du tourisme
Le tourisme de masse est un phénomène récent à La Réunion. En 1963, l’île ne compte que 4 hôtels de tourisme et reçoit 3000 visiteurs. En 1967, le premier Boeing 707 se pose sur l’aéroport de Gillot ; mais l’île reste peu attractive, à cause notamment du monopole d’Air France (et Air Madagascar) sur la destination. Il faut attendre la dérèglementation du trafic aérien (dans les années 1983-86) pour que le tourisme commence à se développer de façon spontanée, et c’est finalement au cours des années 1990 qu’il se développe véritablement, jusqu’à devenir une des ressources économiques importantes de l’île.
En 2000, le chiffre d’affaires du tourisme dépasse celui de l’industrie sucrière locale. Les initiatives se multiplient : des meublés de vacances ouvrent dans l’ouest de l’île ; en 2001, plusieurs communes élaborent le concept des Villages créoles, afin de valoriser la diversité du patrimoine réunionnais. Quinze villages vont ainsi mettre en avant leur spécificité. Pour Bourg-Murat, c’est vivre aux portes du volcan ; pour l’Entre-Deux, ce sont les maisons et cases créoles. Une charte de qualité « Réunion Qualité Tourisme » a été élaborée en 1995 et récompense les meilleurs prestataires de l’hébergement et de la restauration. En 2002, 70 établissements ont rejoint le palmarès des « chartés ». L’accent est mis sur la communication, l’idée étant que pour développer le tourisme, il faut faire connaître La Réunion et en donner une image positive. En matière de paysage, l’écart reste par endroits assez grand entre l’appellation « village créole », séduisante, et la réalité des espaces d’accueil et de vie, nettement banalisés.
Le bilan est positif et la Réunion accueille 426 000 touristes en 2002 et se classe au cinquième rang des destinations lointaines choisies par les Métropolitains. Les régions se sont inégalement développées, le tourisme bénéficiant surtout au nord et aux plages de l’Ouest.
En mars 2005, le conseil régional, nouvel acteur institutionnel principal du tourisme sur l’île suite au transfert des compétences du département, propose l’objectif ambitieux de dépasser le million de touristes en 2020. Mais la foudroyante épidémie de chikungunya qui débute fin 2005 et connaît un pic en janvier 2006 a un effet dissuasif sur les visiteurs, les recettes touristiques extérieures diminuant de 27%, tandis que l’emploi est durement frappé dans l’hôtellerie. Il faut attendre l’orée des années 2010 pour que le nombre de visiteurs retrouve un niveau proche des meilleures années (432 000 touristes en 2003), avec 422 000 visiteurs ayant séjourné à La Réunion en 2009.
Plus de la moitié des dépenses touristiques effectuées sur l’île sont réalisés par la clientèle locale (480 millions d’euros sur 846 millions en 2005). Les programmes annoncent en 2015 un taux de croissance annuelle de 3,3% par an d’ici 2030.
Mais en 2020-2022, l’économie touristique locale est à nouveau frappée par une crise d’ampleur mondiale, la pandémie COVID. La fermeture des liaisons aériennes vers les pays voisins, le confinement, les motifs impérieux et le décalage de situation sanitaire avec la métropole exacerbent les difficultés et l’isolement de l’île.
La destination Réunion fortement orientée sur le marché métropolitain, subit de plein fouet la dégradation de l’économie touristique. En 2020, La Réunion n’accueille que 216 716 touristes extérieurs, soit une baisse de 59,4% par rapport à 2019. Les gites de randonnées connaissent une baisse de fréquentation de 58,5% (Source Observatoire du Tourisme 2020).
Malgré les actions mises en œuvre ces dernières années, la destination Réunion n’a pas suivi les perspectives prometteuses espérées. La communication touristique semble en décalage avec la structuration et la qualification de l’offre.
Les changements sociétaux actuels sont pourtant favorables à la destination Réunion répondant aux besoins croissants de se ressourcer dans la nature, de recherche d’expériences humaines et culturelles enrichissantes et de développement d’un tourisme des sens, combinés à une exigence de sécurité et de qualité.
Les critiques grandissantes relatives à l’avion au regard des émissions de gaz à effet de serre responsables du dérèglement climatique entretiennent une incertitude quant à l’avenir du tourisme de masse longue distance dont dépend aujourd’hui La Réunion.
Une réflexion est engagée sur les problèmes de l’impact du tourisme sur l’environnement, notamment le tourisme intérieur, lui aussi en augmentation grâce à l’aménagement des espaces récréatifs, des sentiers de randonnées et des aires de pique-nique, entraînant une pollution des sites naturels qui n’avait pas été anticipée. Malgré la baisse de 24% en 2020, la fréquentation des sentiers reste élevée : 1 109 000 passages.
De nouveaux objectifs de développement touristique émergent sur les dernières années, ne visant plus le tourisme de masse, mais plutôt un tourisme vert et haut de gamme, qui suppose des paysages protégés et gérés. La création de la Réserve Naturelle Nationale de l’Étang Saint-Paul en 2000, de la Réserve naturelle marine en 2007, du Parc national de La Réunion en 2007 et l’inscription des « Pitons, cirques et remparts de l’Ile de la Réunion » à l’Unesco en 2010 sont des actes marquants permettant d’encourager un tourisme durable respectueux de l’environnement.
Le développement des loisirs de nature
Depuis plusieurs décennies, des efforts remarquables sont consacrés à la randonnée dans les Hauts par le Conseil départemental, l’ONF et la Maison de la Montagne, sur le territoire départemento-domanial : création de chemins de randonnée balisés, de gîtes, de kiosques, etc. En 2002, le Département adopte les itinéraires du PDIPR (plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée) et en confie la gestion à l’ONF. Les chemins balisés de randonnée à pied couvrent 1000 km en 2016 contre 800 km en 2007. Trois grands itinéraires de Grande Randonnée existent : le GRR1 (60 km), le GRR2 (130 km) et le GRR3 (38 km). S’y ajoutent les chemins balisés équestres (100 km) et les cheminements balisés pour le VTT (1500 km) (chiffres Mission Parc National 2003). La Réunion apparaît ainsi particulièrement bien dotée de chemins, d’hébergement (gîtes de montagne, d’étape et de séjour, auberges de jeunesse, chambres d’hôtes, gîtes ruraux, Gîtes de France), de kiosques et d’aires de pique-nique, notamment dans les Hauts.
Des grands événements sportifs traversent les grands sites du cœur de l’île et participent à sa renommée internationale : Le Grand Raid appelé aussi « Diagonale des fous », épreuve difficile de traversée de l’île sur 160 km et plus de 9000 m de dénivelé ; 2350 coureurs y participent annuellement. L’édition 2020 a été annulée à cause de la crise sanitaire et des incendies ayant fragilisé le rempart du Maïdo en novembre 2020, les parcours du Grand Raid et du Trail de Bourbon de l’édition 2021 ont été modifiés en conséquence.
Le budget de gestion alloué par le Département pour l’entretien de l’ensemble du domaine forestier y compris les sites d’accueil est de 3,5 à 4 M€ par an : la part pour la gestion des sentiers est d’environ 2 M€. Les travaux importants de rénovation de sentiers (grosses dégradations après cyclones, construction de passerelle, etc…) font l’objet, en outre, de dossiers spécifiques d’investissement, financés par l’Europe à hauteur de 75%. Pour faire face aux réductions d’effectifs, l’ONF met en place des stratégies de gestion privilégiant la sous-traitance et les interventions sur les sentiers les plus pratiqués.
Le PDIPR (Plan Départemental des Itinéraires de Promenades et de Randonnées) actuel doit évoluer. Le Département souhaite à travers le PDESI (Plan Départemental des espaces, sites et itinéraires) associer les collectivités pour des connections de sentiers ONF avec des sentiers communaux. Pour cela, la CDESI (Commission Départementale des Espaces, Sites et Itinéraires) a été créée par le Département en 2017. Son animation, en 2022, est encore au stade de la réflexion.
Au-delà de la seule randonnée, les loisirs de nature se développent et se diversifient fortement au cours des années 1990. Leur progression est liée au tourisme extérieur, mais aussi aux Réunionnais, de plus en plus urbains et en recherche d’activités de détente :
- Canyoning à Cilaos et dans les Hauts de l’Est : 10 sites en 1989, 210 en 2014
- Vol libre en parapente (10 sites en 1989, 71 en 2014) ou en deltaplane, notamment dans les Hauts de l'Ouest,
- Accrobranche : 1 en 2002, 5 en 2022
- Randonnée équestre : 40 km en 1989, 110 en 2014
- Sports d’eaux-vives dans les rivières de l’Est (kayak, randonnée aquatique, mini-raft, canoraft, hydrospeed) ;
- Escalade, avec de nombreux sites développés en milieu naturel.
Pour le vélo, le VTT a perdu une grande partie des itinéraires faute d’entretien et de coordination entre les acteurs. Les itinéraires existants se limitent à ceux inscrits au PDIR ainsi que la zone VTT du Maïdo créé par l’ONF en 2013 (70 km de piste).
Plus récemment, l’exploration de tunnels de lave par la spéléologie est en forte croissance dans l’est et le sud.
Source de forte pollution sonore, les survols touristiques en hélicoptère (environ 6000 par an, concentrés le matin entre 06h et 11h), mais aussi en ULM et en avions de plaisance, s’ajoutent aux vols utilitaires pour la desserte et le ravitaillement des sites isolés, la lutte contre l’incendie, le SAMU, EDF, etc. Le Parc national a fixé des règles pour limiter et encadrer le survol motorisé au-dessus des zones les plus fragiles et sensibles, tant pour la tranquillité des habitants que de la faune. Les cirques et le volcan sont les secteurs les plus survolés, et notamment le cirque de Mafate qui n’est desservi que par les airs (ou à pied).
En secteur rural, le développement de labels ou appellations accompagne l’essor de la fréquentation : multiplication des gîtes, qui conduisent même localement à un regain de population en secteur isolé, comme à Mafate, création des appellations « villages créoles », « Bienvenue à la ferme », et demain peut-être, agritourisme.
La côte réunionnaise est soumise à des enjeux de protection de la biodiversité importants : le label Pavillon bleu (Symbole d’une qualité environnementale exemplaire) sur les plages surveillées de Saint Paul depuis 21 ans, la Réserve Nationale Marine en 2007.
Les activités liées à la mer sont en net recul du fait des attaques de requin, parfois mortelles qui se sont multipliées sur l’île depuis 2011. Cette situation a un impact sur la pratique du surf et des sports de glisse.
La baignade est également touchée. Un arrêté préfectoral interdit en 2013 la baignade dans la bande des 300 m du littoral sauf dans les lagons, les espaces aménagés et surveillés et les zones d’expérimentation opérationnelles (zonex).
Deux sites à Saint-Gilles-les-Bains (plage des Roches Noires et plage de Boucan Canot) ont été sécurisés par la pose de filets anti-requin pour les pratiques nautiques et de baignade.
Par ricochet, la plongée sous-marine pâtit également des conséquences médiatiques de cette crise, l’activité étant pourtant en augmentation, avec 160 sites en 2014 contre 30 en 2007.
Les bassins de baignade sont envisagés par la Région, comme une réponse à la mer devenue hostile. Les bassins existants sont réhabilités ou restructurés (Boucan Canot, Grand-Bois, Saint-Philippe, Grande Anse, Boucan Canot) ou agrandis. D’autres nouveaux sites de baignades sont recherchés sur le littoral ou en bord de rivière. Cependant, les enjeux de préservation des rivages et les enjeux sanitaires laissent peu de marge de manœuvre pour des ouvrages neufs.
En 2020, le bassin de baignade du Colosse est un exploit technique ; les deux bassins de 1250 et 500 m2 sont alimentés par une eau de mer propre pompée à 400m du rivage et à 20m de profondeur, acheminée sur 800m et traitée par un système de filtration naturelle sans produits chimiques chlorés
Concernant le littoral, un essor important des activités tournées vers la mer a été constaté sur la dernière décennie, avec notamment la fréquentation des plages qui a fortement augmenté et des activités développées dans le lagon (sentier sous-marin, paddle, kayak de mer, kite-surf, palme-masque-tuba). L’activité nautique s’est aussi développée, avec la location de bateau, des sorties en catamaran, l’observation des cétacés (whale-watching) notamment les baleines à bosse (hiver austral), la plongée sous-marine, la pêche au gros.
Les paysages de nature : un patrimoine protégé
mais menacé par un puissant phénomène
d’invasion biologique
La préservation et protection du patrimoine naturel et des sites de nature
L’île de La Réunion accueille une biodiversité remarquables associées à des paysages exceptionnels. Cette nature est notamment représentée par un fort taux d’endémisme, ce qui justifie la reconnaissance de La Réunion comme hotspot pour la biodiversité, avec Madagascar et les autres îles du sud-ouest de l’Océan Indien. Cela a contribué à la création du Parc national et à la reconnaissance au titre de Bien Naturel UNESCO.
Le Parc national de La Réunion a été créé en 2007, il couvre 105 000 hectares, soit 42 % de la surface de l’île. Le « cœur de parc » protège les milieux naturels d’une partie des cirques de Mafate, Cilaos, Salazie et du volcan du Piton de La Fournaise. Il accueille des habitats naturels ainsi qu’une faune et flore remarquables (très fort endémisme), qui se développent selon un gradient altitudinal, avec un point culminant à 3070 m au niveau du Piton des Neiges. La Charte du Parc national doit permettre sa gestion durable pour le territoire des Hauts, et se décline en différents objectifs.
L’île a aussi été reconnue en 2010 au titre du patrimoine mondial avec comme Bien naturel inscrit à l’Unesco les « Pitons, cirques et remparts ». Les limites correspondent peu ou prou à celles du cœur de Parc national, et l’inscription s’est faite au titre de deux critères : critère VII lié au paysage et critère X lié à la biodiversité. Ce classement répond au caractère universel et unique que représentent ces critères. Pour le paysage, cela correspond à des exemples éminemment représentatifs des grands stades de l’histoire de la terre, y compris le témoignage de la vie, de processus géologiques en cours dans le développement des formes terrestres ou d’éléments géomorphologiques ou physiographiques ayant une grande signification. Les milieux naturels remarquables bénéficient de protection ou de zonages adaptés à La Réunion. Pour la biodiversité, cela correspond à des habitats et espèces les plus remarquables et représentatifs pour leur conservation, ayant une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation.
Les massifs forestiers
Différentes menaces pèsent sur les forêts : le développement des espèces exotiques envahissantes (avec forte dynamique naturelle), la pression anthropique (urbanisation, braconnage, aménagements divers…), et certains événements naturels (incendies, cyclones), pouvant être liés au changement climatique.
Des paysages du quotidien touchés par la bio invasion
Les paysages du quotidien, ceux que l’on côtoie en bord de route, en traversant les radiers, en se promenant dans les paysages agricoles, mais également les jardins sont très concernés par l’invasion biologique. Cela se traduit par la fermeture visuelle des paysages et la réduction des transparences sur le paysage alentours. Ce phénomène, non contrôlé semble se répandre de façon rapide et violente et s’imposer peu à peu dans les paysages. Dans les mi-pente, les ravines fortement envahies forment des lieux de concentration et de dissémination d’essences non désirées. De grands paysages de savane sont en cours de disparition (Pentes de Saint Leu).
Enjeux
Les invasions biologiques et l’envahissement des milieux par les espèces exotiques
Depuis plus de 300 ans, différentes espèces végétales ou animales ont été introduites, et se sont développées, au dépend du patrimoine naturel indigène. Aujourd’hui, cette menace est considérée comme la principale cause d’érosion de la biodiversité à La Réunion. Pour la flore, plus de 2000 plantes ont été introduites, avec environ 180 taxons considérés comme envahissants (dont environ 12 parmi les plus envahissantes au monde). Cela entraîne une certaine uniformisation des milieux et une banalisation des paysages. Certaines couvrent même de grandes surfaces impénétrables, inaptes à tout usage de loisir (promenade…) ; c’est le cas des fourrés épineux composés, selon les secteurs, du Cassie blanc (Leucaena leucocephala), de l’Avocat marron (Litsea glutinosa), du choca vert (Furcraea foetida), du Zépinard (Dicranopteris cinerea).
Le développement de la flore exotique est maintenant très prégnant à La Réunion, de l’ouest à l’est, du nord au sud et des Hauts aux Bas. Ainsi, cela concerne différentes espèces et habitats associés, citons :
- la liane papillon (Hyptage benghalensis) qui occupe de très larges surfaces notamment sur les remparts des grandes ravines du Nord-Ouest (Rivière des Galets, Grande Chaloupe, Ravine de la Chaloupe, Ravine à Malheur…),
- le Bois de chapelet (Bohemeria penduliflora) et le Filao (Casuarina equisetifolia), qui, à l'est, dominent aujourd'hui la végétation pionnière de coulées de lave récentes,
- le Faux poivrier (Schinus terebinthifolius) qui occupe les ravines hygrophiles dans l'aire de la forêt chaude et humide descendant également dans l'aire de la forêt sèche,
- le Jamrosa (Sysygium jambos) et le Goyavier (Psidium cattleianum) qui constituent les fourrés secondaires les plus étendues, tant sur la côte est qu'ouest. Le jamrosa ne devient réellement dominant que dans les ravines très humides de la côte « au vent ». Le goyavier pénètre aussi dans l'étage mésotherme des forêts pluviales et également, mais discrètement, dans les ravines fraîches de l'étage semi-xérophile,
- le Fuchsia (Fuchsia magellanica), le longose (Hedychium gardnerianum) qui ont envahi d'importantes surfaces en sous-bois des forêts de montagne,
- le raisin marron ou vigne marronne (Rubus alceifolius), partout où des trouées sont opérées dans le couvert boisé des forêts humides, qui s’est fortement étendu sur la dernière décennie,
- la liane chouchou (Sechium edule) très présente sur les remparts de la rivière du Mât en montant à Salazie,
- l'Ajonc d'Europe (Ulex europeaus) dans les étages de végétation les plus élevés, notamment sur le Maïdo,
- la Corbeille d'or ou Galabert (Lantana camara), le grain noël (Ardisia crenata), etc.
Enfin, pour la faune, 70 vertébrés sont considérés comme exotiques, dont 20 % sont envahissants. À titre d’exemple, le chat pose certains problèmes en prédatant la faune indigène, comme les colonies de pétrels de Barau à plus de 2000 m, oiseau marin endémique. Un reptile, l’Agame des colons, est apparu dans les années 2000 en provenance d’Afrique, ll s’est fortement développé pour maintenant menacer certaines espèces endémiques menacées comme le Gecko vert de Manapany. Le Bulbul de Maurice est apparu dans les années 1970, pour maintenant occuper des forêts d’altitude, et venir concurrencer le Bulbul de Bourbon, endémique de La Réunion.
De manière générale, les dynamiques naturelles sont impactées par ces espèces, nécessitant la mise en place d’une vigilance accrue et de mesures fortes. Les mesures sont très coûteuses, et le rapport coût-bénéfice est discutable, tant ces espèces ont de fortes capacités de colonisation. Une réelle stratégie de lutte doit intégrer l’ensemble des acteurs concernés, en proposant des itinéraires techniques opérationnels, et une gestion durable des espaces impactés. De même, les usagers et la population locale sont aussi à associer à ces actions.
Concernant la lutte biologique, des expérimentations existent, comme celle de l’introduction de la « mouche bleue » pour lutter contre la vigne marronne. Les résultats sont intéressants, bien que certaines questions subsistent (cas de l’interférence avec la niche écologique des abeilles)
La fermeture visuelle et physique des paysages
« Quand on voit les Forêts de kéké qui fleurissent dans l’ouest et notamment sur Saint Leu, une vraie banalisation du paysage apparaît. Cette tendance à l’uniformité n’est pas forcément lisible pour les néophytes ».
Olivier Bielen, Responsable Océan Indien, Conservatoire des espaces Littoraux et des rivages lacustres (CELRL)
La fermeture visuelle des paysages impacte leurs perceptions, la qualité des espaces de vie offerte aux habitants et l’accessibilité des sites. Elle souligne la virulence des phénomènes naturels qui se développent sur un milieu dégradé par la déforestation, l’artificialisation des sols, et l’anthropisation des milieux.
Le fractionnement des paysages
en micro-sites résiduels
« Ce qui est remarquable sur l’île, c’est la notion d’ampleur et d’écrasement lié à la grande verticalité des hauts. On n’a pas le choix, cela s’impose à nous. »
Paul Ferrand, directeur adjoint, PNR
« À La Réunion, on a toujours un arrière-plan majestueux. »
Albine Jaubert, Paysagiste, PNR
À La Réunion, les fractures verticales étant spectaculaires, avec des remparts dépassant 1000 m de hauteur, on parle de grands paysages et même de paysages grandioses. Mais, hormis ces profondeurs verticales, les étendues horizontales apparaissent infiniment plus modestes. Beaucoup de ces paysages paraissent grands alors qu’ils restent objectivement petits : par exemple la Plaine des Sables, la Plaine des Remparts, la savane du Cap La Houssaye et celle de Pointe au Sel, la plaine des Cafres, la plupart des paysages littoraux …
Dans ce jeu d’échelles entre le grand paysage le plus majestueux et le site le plus précieux, il est essentiel de noter l’aspect en trompe l’œil de La Réunion ; ce qui est vrai de La Réunion en général est vrai aussi pour certains paysages : ils paraissent vastes alors qu’ils restent objectivement petits. Ils semblent comme de grandes étendues alors qu’ils ne constituent que de fragiles sites. Aussi apparaissent-ils tout particulièrement sensibles aux erreurs d’échelles, qui feraient arriver des équipements cassant l’impression généreuse qu’ils offrent. Citons par exemple :
La savane du Cap La Houssaye : elle n’a de valeur que par son étendue pure, vierge de constructions, qui la fait paraître grande dans son manteau lumineux de graminées. Or la pression est très forte sur ce site : outre la Route des Tamarins s’ajoutent les ZAC Renaissance III et de l’Eperon, la déviation de l’Eperon, les tentations d’irrigation et de mise en culture, … Cette pression a fragilisé l’entretien par brûlis et pâturage, conduisant à l’enfrichement de la savane et à sa progressive fermeture, phénomène spectaculaire depuis notamment le chantier puis l’ouverture de la Route des Tamarins (2009).
La plaine des Cafres : dans une toute autre ambiance, elle aussi est finalement petite, modestement étendue de Bourg-Murat au rempart de Bellevue. Or elle offre des paysages de plateaux pâturés uniques, balayés par les nuages, bordés par la forêt tropicale d’altitude, sertis dans des landes piquées d’ajonc, agrémentés par endroits de chaos rocheux, de fougères arborescentes, ou de petits sophoras trapus ; elle aussi est soumise sur ses marges à la pression d’une urbanisation médiocre (Bourg Murat, …) et en son cœur à des implantations d’équipements agricoles, techniques ou touristiques sans qualité architecturale ni paysagère ;
La Plaine des Sables : là encore il s’agit d’un faux grand paysage, subjectivement grand et objectivement petit, au caractère unique dans l’île : la plaine des Sables, avec son étendue nue, minérale, sombre aux reflets rougeoyants, sableuse et rocheuse à la fois, évoque un morceau de lune, ou de mars, et renvoie à une échelle cosmique alors qu’elle ne couvre dans la réalité que quelques hectares : 2 km de large pour 3 de long.
Les paysages du volcan plus généralement, évoquent souvent des grands paysages, aux étendues de landes mystérieusement drapées dans les nuages, sans que les superficies soient importantes. La rudesse climatique nanifie les plantes qui, à une échelle très détaillée, peuvent même évoquer de grands paysages, tout comme les rochers peuvent évoquer des montagnes.
- Elle les rend sensibles à toute « intrusion » d'aménagement, équipement, construction, de quelque nature qu'il soit, qui « casse » l'échelle et leur fait perdre leur fausse grandeur ;
- Elle les rend sensibles à la présence du public qui, en se concentrant sur un espace modeste, provoque les problèmes de surfréquentation évoqués ci-dessus.
La fragilité intrinsèque de ces petits « grands paysages » est aggravée par les dispositions d’aménagement, qui les fragmentent et les réduisent. Aujourd’hui, beaucoup de paysages ne peuvent s’afficher et se vendre que comme des photographies étroitement cadrées :
- cadre serré sur le cocotier ou le filao alangui au bord du lagon de l'Ermitage-les-Bains, pour échapper aux équipements touristiques,
- cadre serré sur la côte sauvage des souffleurs de Piton Saint-Leu battue par les flots, pour échapper à la route nationale rasant ce même trait de côte,
- cadre serré sur la « forêt » de vacoas en bord de mer de Vincendo, réduite dans la réalité à un maigre bosquet,
- cadre serré sur le champ de canne vert tombant dans la mer bleue à Sainte-Marie, pour oublier l'urbanisation qui le grignote de part et d'autre,
- cadre serré sur la cascade Niagara pour échapper au parking du premier plan,
- cadre serré sur les étendues d'eau sereines de l'étang du Gol, pour échapper à son contexte routier et périurbain,
- cadre serré sur l'échancrure profonde et sauvage de Bernica, en tournant le dos à la Route des Tamarins,
- cadre serré et plongeant sur Grand Bassin, en ignorant les étendues de parkings qui bordent le point de vue,
- cadre serré sur la gracieuse case et son jardin charmant, pour ôter du regard les cubes de béton sans âme qui la dominent de part et d'autre,
- cadre serré sur l'alignement de palmiers de Savanna, pour ignorer la zone d'activités attenante,
- etc. : les exemples sont innombrables.
Les sites de La Réunion en général sont comme des bijoux précieux et fragiles ; ils prennent d’autant plus de valeur qu’ils sont présentés soigneusement, dans des écrins protecteurs.
Or, pour beaucoup de sites Réunionnais, c’est là que le bât blesse : les cadrages photographiques serrés de cartes postales laissent croire à des étendues remarquablement préservées ; la réalité du contexte de chaque site, hors champ, apparaît bien souvent beaucoup plus prosaïque et malheureusement mal maîtrisée. C’est le défi de la politique d’aménagement qualitatif du territoire de l’île : passer de la protection du site extraordinaire à la préservation du paysage ordinaire ; élargir le cadrage pour embrasser le paysage quotidien ; passer du cadre photo au cadre de vie.
Ainsi aujourd’hui, beaucoup de ces fragiles paysages sont réduits à des décors exigus, à des clichés, à voir et à prendre d’un point précis, mais impossibles à vivre et non créateurs d’ambiances authentiques. Le problème est aggravé même avec les meilleures intentions, comme les aménagements touristiques qui visent à gérer la fréquentation, obligeant désormais à suivre des parcours quasi-imposés, comme à l’Anse des Cascades (platelages), ou à subir des barrières sur le littoral comme au Cap Méchant.
Les paysages de La Réunion ont besoin d’une politique qui aille bien au-delà des « sites », capable de remettre en scène et de réhabiliter non seulement les sites mais leurs relations et leurs transitions avec le contexte dans lequel ils prennent place, pour vivre des expériences plutôt que pour consommer des cartes postales étroitement cadrées et policées.
L’urbanisation des rebords de ravines
Sur les pentes extérieures de La Réunion, les ravines, profondes et difficiles d’accès, sont souvent les seuls espaces de refuge de la faune et de la flore indigènes ou endémiques de l’île. Elles sont généralement identifiées et préservées à ce titre. La pression de l’urbanisation conduit malheureusement à urbaniser les rebords de ces ravines jusqu’au ras des remparts. Ce processus pose plusieurs problèmes écologiques et paysagers :
- Il aggrave le problème de dérangement des espèces et de pollution des ravines (bennage des ordures domestiques, ruissellement des eaux des surfaces imperméabilisées, chargées de polluants) ;
- Par endroits il aggrave les risques liés aux glissements et aux inondations ;
- Il privatise définitivement des espaces attractifs pour la population, offrant des vues et constituant des sites de pique-nique, promenade ou loisirs appréciés ;
- Il rend impossibles les liaisons douces continues amont-aval au fil des ravines ;
- Il contribue à dégrader les paysages et les milieux liés aux ravines par les murs de soutènement des maisons en béton ou parpaing brut au ras des rebords de ravines, très visibles depuis la rive opposée.
La fragilité du tourisme de nature
L’activité touristique, reste fragile. Elle est notamment largement dépendante du coût du transport aérien, même si le tourisme intérieur produit plus de la moitié de la richesse. Mais elle est aussi dépendante de la qualité paysagère de l’île : comment attirer un tourisme haut de gamme et rémunérateur dans une situation mondiale très concurrentielle (nombreuses îles tropicales à coût de main d’œuvre peu élevé), sur une destination lointaine et isolée, si la qualité n’est pas au rendez-vous ?
2021 représente une année de reprise pour le tourisme à La Réunion avec + 15,7 % (par rapport à 2020). La Réunion a accueilli 250 812 touristes extérieurs au cours de l’année 2021, ce qui représente une augmentation nette de 34 096 touristes extérieurs. Après une perte vertigineuse en 2020, la destination Réunion retrouve le chemin de la croissance. En 2022, le nombre de visiteurs extérieurs (495 000) est proche de celui de 2019. De nouveaux défis de développement se présentent : la reconquête des marchés principaux et le lancement d’une stratégie touristique durable à taille humaine. Des caractéristiques qui se confirment et des tendances qui évoluent : une durée moyenne de séjours qui s’allonge (21 jours) avec des particularités par catégorie : affaires (21 jours), agrément (19 jours), affinitaires (24 jours) (Source : Fréquentation touristique 2021 Observatoire Régional du Tourisme).
Certes les appellations prestigieuses sont des sources d’attractivité touristique très importantes : le Parc national, l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO, jouent à l’évidence en faveur de l’attractivité de l’île.
Mais au-delà des appellations, qui concernent uniquement les Hauts, l’activité touristique est confrontée à de nouveaux défis : comment développer le tourisme sans détruire le fonds de commerce, à savoir paysages et culture locale ?
Comment préserver ou développer l’attractivité des Bas (littoral et pentes agricoles — où l’on séjourne) complémentaires au sanctuaire que forment les Hauts (où l’on se promène et pratique des activités sportives ou de loisirs), dans un contexte de développement urbain puissant et mal maîtrisé ? Comment mieux répartir les fréquentations dans l’espace et dans le temps pour limiter les problèmes grandissants de surfréquentation et de fragilisation de sites ?
Dans tous les cas, il est urgent de mettre en adéquation la réalité du paysage avec celles des autres appellations, moins mondiales ou nationales, et plus locales : « villages créoles », par exemple, qui s’applique par endroits à des bourgs dont l’attractivité paysagère reste faible ; le même enjeu concerne plus globalement les centres-bourgs ainsi que, ponctuellement, de nombreuses adresses de location de gîtes, de chambres et tables d’hôte, etc.
L’actualisation du schéma de développement et d’aménagement touristique de La Réunion de 2018 (SDATR) a défini des axes stratégiques aujourd’hui lisibles dans le territoire et qui s’articulent autour d’une volonté d’améliorer et de dynamiser le potentiel existant :
- L’amélioration et la diversité des modalités d’accès aux grands sites et la tarification aux accès ou au stationnement.
- La valorisation du patrimoine d’interprétation : sentiers thématiques, musée ou centre d’interprétation.
- L’animation des sites touristiques par la mise en place de visites thématiques, d’ateliers pédagogiques, de festivals…
- Le développement des écolodges innovants et identitaires notamment dans les Hauts.
- L’investissement dans les équipements innovants : skywalk, tyrolienne, saut à l’élastique en vélo…) pour fabriquer des expériences originales et « fun ».
- La mise en place de structures d’accueil du public (restauration, sanitaires...) pour améliorer le confort des visiteurs et améliorer les retombées économiques.
- Le renforcement de l’attractivité des sites pour leur mise en réseau sous une marque commune.
- Le développement des aires protégées, avec label de protection de la nature et mise en éco tourisme, etc.
Les orientations stratégiques touristiques peuvent marquer de façon négative le territoire si elles ne sont pas accompagnées d’un souci de justesse des interventions et dans le respect des sites et des paysages. En témoignent les nombreux Écolodges présentés aujourd’hui par plusieurs communes de l’île dans des sites parfois stratégiques. À noter également la diversité des projets innovants et parfois très ambitieux imposant des gestes peu mesurés très marquants dans le paysage.
Des démarches de grands sites
Le Département et différents acteurs (PNR, ONF…), mènent une politique « Grand Site » sur les espaces singuliers de l’île par une démarche d’accueil du public (stationnement, points de vue) et d’insertion dans les grands paysages.
Second site le plus fréquenté après celui du Pas de Bellecombe, avec plus de 250 000 visiteurs/an, le Maïdo, fermé suite aux incendies de novembre 2020, a été sécurisé en mars 2021 par l’aménagement des belvédères réouverts. L’étude actuelle vise à inscrire le Maïdo dans un périmètre plus large (allant du Belvédère à Petite France) pour construire un projet ambitieux valorisant les différents étages paysagers ponctuant l’itinéraire d’accès. Une enquête d’opinion devrait également permettre de préciser les besoins de la population réunionnaise et de passage sur les aménagements et services attendus.
La valorisation du massif du Volcan poursuit une démarche similaire. Cela concerne une mise en cohérence des différents programmes : rénovation du gîte, création d’un éco- lodge, devenir de la piste de la Plaine des Sable, Route des Laves…), en intégrant également un développement global et cohérent des Portes et itinéraires de découverte du Parc national.
Au-delà des grands sites, sur les sites de nature, quelle que soit leur taille, la tendance est au déséquipement (pas de corbeilles…) responsabilisant les usagers sur l’état de propreté des sites. De rares équipements en toilettes sèches sont proposés sauf à Cap Noir à La Possession, du fait des contraintes de gestion générées.
Des outils de concertation et d’actions opérationnelles
Le SIVE (Schéma d’interprétation et de valorisation écotouristiques) lancé par le PNR donne les grandes intentions qui se déclinent en PIVE (Plan d’interprétation et de valorisation écotouristiques), approche concertée plus opérationnelle : PIVE de Salazie, Mafate, Volcan…
Les PIVE ont permis à l’ONF de développer sur différents sites une démarche mieux intégrée à grande échelle. Les sites d’accueil du public de la route forestière du Volcan ont été aménagés dans le cadre du PIVE du Massif. L’ensemble des aires renaturées participe aujourd’hui à la qualité de la mise en scène de la voie d’accès au volcan.
Le Plan de paysage lancé en 2022 par le Parc national vise à mobilier les élus sur le partage de connaissance et les valeurs du paysage par une démarche multiscalaire permettant de mettre en perspective les différents acteurs et projets.
La fragilisation des forêts
« Pour qu’un paysage puisse vivre, il faut avoir des références. Or, il n’y a quasiment plus aucune forêt en état de marche…On n’a plus les références des forêts qui ont permis l’accueil des populations de l’histoire humaine de la Réunion. Il en reste quelques traces altérées comme Mare Longue, Les Hauts du Volcan… On n’a plus les forêts des Bas. On a des chaînons manquants pour une île aussi jeune. »
Michel Reynaud, architecte, paysagiste, membre de la SREPEN
- Sur le bord de mer de Cambaie, la forêt étroite doit faire face à l’érosion littorale et aux pressions de fréquentations qui devraient largement se développer avec l’urbanisation de la Plaine de Cambaie.
- Dans les massifs forestiers et à Mafate, une pression touristique liée à une nouvelle offre d’hébergement innovant est fortement présente (Écolodge, hébergement en bulle…). Ces nouveaux projets interrogent sur la capacité de ces paysages à absorber ces nouveaux équipements.
- À noter également, la difficulté d’insertion des nouvelles voies réalisées par les collectivités dans les espaces naturels ; des ouvrages mieux dimensionnés aux usages seraient moins impactants et moins coûteux.
- Le développement des espèces invasives favorise la naissance de paysages monospécifiques, dans des milieux complètements dégradés.
- L’impact de sécheresses récurrentes, ces dernières années semble favoriser le développement du Psylle, insecte venu d’Australie et à l’origine du dépérissement récent de Tamarin des Hauts (Acacia heterophylla). Ce phénomène de dépérissement en lien avec le changement climatique est un facteur nouveau pour les forestiers.
Parallèlement, la politique forestière tend vers plus de naturalité des forêts, en limitant les plantations (cryptomeria…).
Orientations
Organiser l’accueil du public et gérer la fréquentation dans des dispositions douces
Objectifs
- Poursuivre la mise en valeur paysagère et environnementale des sites naturels et culturels.
- Réduire la pression et organiser la fréquentation sur les sites les plus sensibles.
- Sensibiliser et informer le public sur les espaces naturels et culturels.
- Développer la prise de conscience des derniers restes de l'île originelle et sa biodiversité.
- Promouvoir une gestion adaptée, différenciée et pérenne des espaces.
Principes
- Mettre à distance les stationnements et les inscrire dans le paysage de façon discrète et douce.
- Offrir des services dans des lieux adaptés et ne menaçant pas la qualité des paysages de nature.
- Maîtriser la qualité paysagère, architecturale et environnementale des équipements d’accueil écotouristiques : restaurants, hébergement, signalétique, stationnements, aires de pique-nique, points de vue, équipements techniques...
- Réduire la fréquentation des sites surinvestis en répartissant la pression vers les basses pentes rétro-littorales et les mi-pentes agricoles et urbaines : développement de l’agritourisme et du tourisme vert, accueil « à la ferme », nouveau réseau de circulations douces piétons/vélos/cheval...
- Poursuivre le travail de qualification des sites d’accueil et points de départ de randonnées
- Poursuivre la gestion de la surfréquentation et l’organisation de découverte de certains sites en voie de saturation.
- Former et qualifier les ouvriers des espaces naturels pour des interventions à la hauteur des enjeux des sites à préserver.
- Éviter le sur-entretien des espaces et sites naturels.
Illustrations
Composer une trame verte et bleue structurante pour les pentes
Objectifs
- Préserver la biodiversité en offrant des espaces de circulation de la faune et de la flore (corridors biologiques).
- Favoriser les échanges naturels hauts/littoral à travers les pentes agricoles et urbanisées et horizontaux à travers les espaces naturels ou de natures ordinaires, les andains, les haies et autres lisières.
- Créer des espaces de nature en partie appropriables par les habitants et touristes (espaces naturels de proximité pour les promenades, les loisirs).
- Préserver ou créer des transparences écologiques au sein des projets urbains.
Principes
- Rétablir la continuité écologique des cours d’eau : protéger certains cours d’eau en tant que réservoirs biologiques.
- Protéger largement les rebords hauts des ravines en plus des ravines et cours d’eau proprement dits (protection contre l’urbanisation et mise en valeur agricole, paysagère et environnementale : passage de circulations douces amont-aval, valorisation des points de vue, aménagement ponctuel d’accueil du public…).
- Préserver ou recréer des trames végétales naturelles au sein des espaces agricoles à l’aide des ravines, talwegs, dépressions, pitons...
- Protéger les coupures d’urbanisation et espaces de respiration dans les pentes (protection contre l’urbanisation et mise en valeur agricole, paysagère et environnementale, matérialisation des limites par l’aménagement paysager de seuils et de lisières urbaines).
- Créer des réservoirs de biodiversité relais sur les mi-pentes, entre Hauts et littoral.
- Promouvoir la qualité paysagère, environnementale et architecturale des aménagements hydrauliques (bassins, épis, digues, ouvrages d’art …) : faire appel à des hommes de l’art pour leur conception et leur mise en œuvre (paysagistes, architectes, écologues...).
- Apporter de la cohérence écologique aux projets d’aménagement : palette végétale adaptée écologiquement et paysagèrement, espaces fonctionnels...
- Préserver, voire conforter les « langues » de végétation descendant jusqu’au littoral dans l’Est.
Illustrations
Protéger et valoriser les paysages naturels littoraux
Valoriser économiquement la forêt (et les espaces associés) en favorisant des pratiques éco-compatibles
Le Programme régional de la forêt et du bois de La Réunion a été défini pour la période 2020-2030. Il précise notamment ce qui doit être réalisé pour conserver et valoriser la forêt et l’ensemble des espaces associés. Il se décline en orientations stratégiques (5), objectifs opérationnels (6) et un plan d’actions.
La prise en compte de la biodiversité et des paysages sont intégrés dans ce programme, notamment avec la prise en compte des enjeux environnementaux, la conservation des forêts, la valorisation des paysages, une gestion durable adaptée (lutte EEE notamment), et l’accueil du public (aménagements dans les espaces naturels…).
Sur les orientations importantes, cela concerne la gestion des incendies (menaçant les forêts), la conservation de la nature (en lien avec la restauration écologique, lutte EEE, biodiversité…), l’accueil du public, la poursuite d’une production sylvicole durable, et la gestion des risques (érosion).
Illustrations
Revaloriser les paysages de l’eau douce
Gérer les plantes envahissantes et prévenir leur développement
À partir de 2008, avec l’ensemble des partenaires locaux, une démarche collégiale pilotée par la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, le Parc national de La Réunion, le CIRAD, le Conservatoire botanique, le Département (etc.) a été lancée pour définir une stratégie régionale de lutte contre les invasives. En 2010, en lien avec la Stratégie Réunionnaise pour la Biodiversité (SRB), cela a abouti à la définition d’un plan d’action, qui se décline sous la forme d’un Programme Opérationnel de Lutte contre les Invasives (POLI). Initialement, cela a été défini selon 4 axes et actions associées, à savoir :
- Axe 1 : Prévenir les introductions nuisibles, intentionnelles ou non, de nouvelles espèces exotiques envahissantes.
- Axe 2 : Lutter activement contre les espèces exotiques.
- Axe 3 : Sensibiliser, communiquer, éduquer et former.
- Axe 4 : Gouverner et animer la stratégie.
- Axe 1 : Prévenir les introductions nuisibles, intentionnelles ou non, de nouvelles espèces exotiques envahissantes.
- Axe 2 : Préserver les milieux naturels et espèces identifiés comme prioritaires : cela se traduit notamment sur la priorisation des enjeux de conservation contre le développement des EEE.
- Axe 3 : Innover et échanger pour améliorer l’action durablement : il est nécessaire de développer les solutions de lutte, en associant davantage le monde de la recherche.
Depuis deux décennies, de nombreuses actions ont ainsi été mises en place pour lutter contre les EEE, mobilisant des investissements importants dans des chantiers de lutte, avec des résultats inégaux suivant les habitats ou espèces visées. Parmi les actions fortes mises en place dernièrement, un arrêté ministériel a été défini : AM du 28 juin 2021 interdisant d’importer et de détenir des espèces animales exotiques à La Réunion. Cela signifie que ces espèces ne sont plus autorisées à l’importation, à la commercialisation ni à la détention (sauf les animaux déjà possédés avant l’arrêté).
Illustrations
Améliorer la qualité paysagère et environnementale des aménagements contre les risques naturels
Objectifs
- Contribuer à limiter les risques sans déprécier les paysages et les milieux de La Réunion.
Principes
- Achever les PPR limitant les constructions en zones à risques.
- Faire appel à des hommes de l’art (paysagistes, architectes, écologues en plus des ingénieurs et techniciens) pour la conception et la réalisation des ouvrages de protection contre les inondations : digues, bassins de rétention, déversoirs, barrages écrêteurs, exutoires des ravines… et des actions préventives : curages préventifs des rivières et ravines.
- Idem pour la conception et la réalisation des ouvrages de protection contre les incendies et feux de forêts : voies d’accès, postes d’observation, aires d’hélicoptères, signalétique, retenues collinaires, … et des actions préventives : zones débroussaillées contre l’incendie (pare-feux, coupures de combustibles, bandes de sécurité).
- Idem pour la conception et la réalisation des protections contre la houle et l’érosion marines : suppression des dispositifs en dur en haut de rivage, remplacement par des techniques de génie végétal ou des techniques mixtes absorbant l’énergie de la mer…
- Idem pour la conception et la réalisation des protections contre les mouvements de terrain : limitation des poses de filets, inscription paysagère des gabions…
- Développer la culture et la mémoire du risque en préservant les traces des dégâts dès lors que c’est possible (éboulements, coulées volcaniques, érosion marine…) + apport d’information pédagogique in situ.
Illustrations
Deux situations contrastées sur ces deux photos :
– Haut de plage en dur aggravant l’érosion de la plage par la mer (Saint-Gilles-les-Bains plage des Roches Noires)
– Haut de plage doux végétalisé, non érosif et protecteur (Saint-Pierre).