5. Les processus, enjeux et orientations thématiques

Les paysages
des activités
et des équipements

Processus

Le développement des zones d’activités

Façade zone d’activité artisanale, Eperon, Saint Paul, 2022.
Ambiance soignée zone d’activité Eperon, Saint Paul 2022.

Les besoins en zones d’activités sont importants sur l’île, liés notamment au développement d’activités productives (industrie, BTP, commerce de gros). Partout des projets émergent, que ce soit près des grands pôles urbains, sur le littoral ou dans les bourgs des pentes.

Une dynamique d’extension des zones d’activités sur les pentes agricoles littorales de Saint-Pierre s’est produite ces dernières années entachant l’homogénéité des paysages agricoles.

Des zones industrielles (ZI 3 et 4) et la zone commerciale Bank affichent des bâtiments imposants en façade de la RN2, participant à la fermeture visuelle sur les paysages particulièrement remarquables des pentes du Dimitile et de Saint-Louis. Le projet « Pierrefonds Grand Sud » sur les berges de la Rivière Saint-Etienne sonne le glas des paysages de la plaine fertile agricole de Pierrefonds, et l’entité patrimoniale de l’usine.

Le long de la Route des Tamarins, plusieurs projets continuent de se développer : les ZAC du Portail et de l’Eperon profitent de l’effet de façade pour développer des bâtiments commerciaux et tertiaires.

En 2022, ces importants besoins de développement sont à intégrer dans les logiques de développement du territoire. Cette pression est très présente puisque le marché en immobilier tertiaire et d’activité est extrêmement tendu, en particulier dans le nord et l’ouest de l’île.

Tensions sur les carrières, les matériaux de construction et les décharges

Carrière de Cambaie, préalable à la ZAC de Cambaie (Ecocité).
Bassin de la carrière de galets de basalte, Ma Pensée, Bras Panon, 2017.
Carrière de la rivière des Remparts.

La question sensible des carrières

Les activités du BTP nécessitent un emploi régulier de matériaux de construction pour les fondations et structures des bâtiments et infrastructures. Les carrières en activité sur le territoire forment une succession de lieux d’activité et de paysages transitoires, accompagnés de nuisances contrôlées (bruit, poussières, circulation de camions). Sans réflexion paysagère d’ensemble ni anticipation de leur transformation à terme, les sites de carrière peuvent dégrader les paysages, nuire au cadre de vie et rendre très difficile la réhabilitation ou recréation de paysage.

Les carrières situées souvent sur les pentes littorales (berges de ravine ou basses pentes), du fait de la disponibilité et de l’accessibilité en matériaux alluvionnaires, affectent les zones agricoles et les espaces de nature. Le secteur de Pierrefonds a été totalement remanié ces dernières années par les exploitations de matériaux affectant l’ensemble du paysage de la plaine littorale : perturbation du relief (excavation des parcelles), atteinte à la structure végétale d’origine (haies, alignement de palmiers…) et dégradation totale des sols cultivés.

Dans le cadre de la NRL, plusieurs projets de carrières situés en lisière de zone urbaine (Carrière des Lataniers, Carrière de Bellevue), en zone naturelle (Carrière de Bois Blanc) ou en zone agricole (secteur des Orangers) ont suscité des réactions nombreuses de la part des riverains et des associations de protection de la nature. Parallèlement, une longue bataille juridique autour du Schéma Départemental des Carrières et des Autorisations environnementales a eu raison de ces projets.

La filière construction trop dépendante de l’exportation de matériaux

Superposition de roches de basalte, Cilaos, 2022.

La Réunion est très pauvre en termes de filières d’approvisionnement. Le basalte, matériau socle de la géomorphologie de l’île, voit son exploitation contrôlée par le Schéma directeur des carrières ; les granulats sont exploités avec une ressource qui se raréfie. La crise d’approvisionnement en roches massives de la NRL a montré les limites de l’exploitation des ressources locales. Le bois constitue une ressource sous exploitée et peu valorisée au regard des forêts de bois d’œuvre existantes. L’exploitation est aujourd’hui concentrée sur le cryptomeria, bois à croissance rapide de qualité secondaire, dans une filière insuffisante pour répondre aux besoins locaux. Des filières balbutiantes comme le bambou, le vétiver, le chanvre, ainsi que le réemploi sont au stade de filières émergentes.

Plusieurs études sur les matériaux biosourcés sont en cours (étude sur les isolants biosourcés – Autre étude DEAL « Isobio dom »).

L’incitation à l’utilisation de matériaux biosourcés et géo-sourcés fait partie des politiques publiques portées par le Ministère de la transition écologique, qui ont trouvé un fort écho dans le cadre du Plan de relance 2020-2022. Les stratégies engagées dans le cadre du 4ème Programme d’Investissements d’Avenir (PIA 4) pour accompagner l’innovation (pendant la relance et au-delà) soutiennent des réflexions de recherche. La DAAF a lancé par exemple en 2022 une étude sur la stratégie d’accélération pour les produits biosourcés et les carburants durables.

Des décharges aux centres d’enfouissements

Centre d’enfouissement de Sainte Suzanne émergeant dans le paysage des pentes.

La politique d’économie circulaire rendue publique en mai 2018 par le gouvernement offre l’opportunité d’un nouveau modèle économique permettant d’économiser les ressources, de mobiliser les acteurs vers le recyclage et la valorisation énergétique et de réduire les déchets à traiter. Les singularités de l’île contraignent la gestion des déchets : insularité, population élevée et forte pression foncière, relief accidenté, climat tropical et risques sanitaires.

L’enfouissement est le mode de gestion majoritaire (66 %) pour les déchets ménagers et les autres déchets d’activités économiques. Hors déchets du BTP, le tonnage des déchets enfouis sur l’île de La Réunion s’élève à 505 kt par an. La majorité des déchets organiques d’activités économiques est valorisée comme matière organique, 36 % est valorisé énergétiquement (pour l’essentiel de la bagasse).

Les deux centres d’enfouissent de La Réunion seront saturés rapidement. À la décharge de Pierrefonds, 800 tonnes d’ordures supplémentaires sont amenées chaque jour, soit deux tiers des déchets de l’île. Leur traitement par enfouissement ne sera bientôt plus possible, en raison de la loi sur la transition énergétique qui prévoit une réduction de 50 % des déchets enfouis d’ici à 2025, Ces avancées sont toutefois repoussées d’année en année, prises au centre de rivalités politiques locales (Le Monde, 28 décembre 2019).

Le chantier d’incinérateur du Sud qui fait polémique doit être finalisé en 2024. Il est situé à Pierrefonds, à côté de l’actuel centre d’enfouissement sur six hectares de terrain avec 20 000 m³ de béton et 250 kilomètres de câbles électriques. Au total, 230 000 tonnes de déchets du Sud et de l’ouest du l’île seront traités dans ce centre avec trois filières. Le recyclage classique, la méthanisation organique de déchets biodégradables et la revalorisation énergétique, en incinérant les déchets. Un centre d’enfouissement des déchets envisagé par le SYDNE, le Syndicat mixte de traitement des déchets du Nord-Est de l’île, doit s’implanter.

Si l’objectif « zéro déchet » est partagé par la quasi-totalité des partenaires, le pragmatisme et la contrainte de temporalité commandent de trouver une solution de transition temporaire et réversible au tout enfouissement. La valorisation énergétique des déchets pourrait évoluer vers la fabrication et la combustion de CSR ; cette solution réversible avec la biomasse au fur et à mesure des avancées de l’objectif partagé « zéro déchet » s’inscrit dans les objectifs du PPE. À ce jour, le choix du scénario de valorisation énergétique de CSR n’est pas validé (Source Gestion des déchets sur l’île de La Réunion – 2018 – CGEDD)

Enjeux

Une stratégie claire en termes de gestion de la ressource

Le cas du chantier de la NRL avec la difficulté de son approvisionnement en matériaux de construction questionne la pertinence de la stratégie et des choix d’aménagement associés.

Il montre que l’insularité impose une gestion circulaire de la ressource, de son exploitation et des filières de valorisation. Cette approche complexe en cours de réflexion est encore émergente à La Réunion. Elle impose une vision prospective du développement de l’île, le développement des différentes filières et l’adaptation des modes constructifs et des références culturelles locales.

L’insertion des équipements associés aux activités humaines

Les objectifs poursuivis par les projets d’équipements ou de zones d’activité doivent à la fois correspondre aux projets de développement de territoires mais également répondre durablement aux attentes des collectivités en favorisant la croissance économique, tout en préservant le patrimoine et le bien-être social. Cela implique par exemple des choix stratégiques de lieux d’implantation pas uniquement guidés par l’économie et de considérer les projets à une échelle plus globale dans la prise en compte des grands enjeux suivants :

Orientations

Améliorer l’insertion transitoire et définitive des sites d’exploitation de matériaux
et des centres d’enfouissements

Objectifs

Principes

Illustrations

Emprise gigantesque de la carrière avant le projet de ZAC de Cambaie, Ecocité, Saint Paul, 2020.

À Cambaie, les carrières en exploitation ont été inscrites dans l’ambitieux projet de l’Ecocité et de la ZAC de Cambaie. Les urbanistes ont intégré dès la conception les dénivelés et l’organisation des accès acceptables pouvant permettre la construction de la future ville durable. Le projet de la carrière des Lataniers (ancienne carrière) projetait la création d’un parc de nature en ville.

Accompagner le développement des matériaux biosourcés et des savoirs faires locaux

Objectifs

Principes

Clôture et réemploi Eperon, Saint Paul 2022.

Améliorer la qualité architecturale
et paysagère des équipements

Objectifs

Principes

Illustrations

Une antenne déguisée en palmier (2009).
Poste EDF « habillé » de toit de tôle et de basalte. Le Port, 2007.
Une citerne masquée - route du Maïdo, 2007.
Un dessous d’ouvrage valorisé (Promenade de Bernica, passage sous la route des Tamarins, Saint-Paul – paysagiste : Agence Folléa-Gautier, 2011).
Toiture végétale, citernes parc du Colorado.

Élaborer une stratégie d’ensemble
pour les zones d’activités

Objectifs

Principes

Maîtriser l’aspect des activités
depuis les infrastructures

Objectifs

Principes

Illustrations

Bon exemple d’entrée de ville, avec une bande plantée entre la route et les activités pour qualifier et maîtriser le paysage de l’urbanisme commercial (Le Port).
Préférer les publicités peintes aux publicités sur panneaux. Elles font partie du paysage de bord de route et signalent en général les boutiques.

Valoriser l’architecture et le paysage
des zones d’activités

Objectifs

Principes

Illustrations

Premier plan végétal public, discrétion de la clôture privative, inclusion de l’enseigne dans le volume bâti : des principes simples qui améliorent le paysage des zones d’activités (Le Port, 2007).
Bois et tôle utilisés de façon renouvelée pour ce bâtiment d’activité industrielle. Le Port, 2007.
... Et demain ?
Aujourd'hui...
L’activité industrielle fait partie du cadre de vie et mérite une mise en valeur paysagère : images avant-après. (Extrait de la Charte paysagère du tco, 2008, image Agence Folléa-Gautier).
Architecture de qualité et abords soignés, Eperon, Saint Paul, 2022.
Limite soignée pour cette zone d’activités de Quartier Français (Saint-André), grâce au traitement paysager des bassins de rétention et aux plantations d’accompagnement.
Reconversion de site et de bâtiments pour la zone d’activités de la Mare (Sainte-Marie).
2020
1957
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