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6. Les pentes de Saint‑Pierre / Le Tampon
Fiche
d'identité
Les pentes du Tampon courent du Bras de la Plaine à la Rivière d’Abord. Régulières et très longues (près de 20 km pour 5 à 7 km de large), elles s’infléchissent vers 1500 m d’altitude pour laisser place à la Plaine des Cafres.
La régularité de ces pentes un peu moins raides que la moyenne, et la proximité de Saint-Pierre, ont favorisé le développement de l’urbanisation diffuse à partir de voies tracées parallèlement aux courbes de niveaux et à distances à peu près régulières : Ligne Paradis, Ligne des Bambous, Ligne des quatre-cents, ligne des six-cents, D 27, route des Caféiers. Avec le développement urbain également au fil des routes grimpant la pente, en particulier de la RN 3, c’est au total une très vaste conurbation qui est en passe de se constituer, aussi vaste que Paris… mais treize fois moins dense.
Communes concernées : Saint-Pierre, le Tampon
Unités de paysages
locales
6b. Les pentes du Tampon
Le littoral de Saint-Pierre et des pentes cultivées
Occupé par la ville de Saint-Pierre et l’aéroport, ses espaces agricoles sont soumis à de fortes pressions de développement.
Les pentes du Tampon
Elles forment les plus longues pentes urbanisées de façon quasi-continue, de 100 à 1 300 m d’altitude.
Caractéristiques
paysagères
Une plaine alluviale cultivée.
Une reconquête littorale initiée sur une côte ventée et aride.
De longues pentes régulières, largement colonisées par l’urbanisation
Une toile de fond grandiose offerte par le Dimitile
Une route stratégique, la RN 3
La RN3, une route stratégique importante, la seule à traverser l’île par l’intérieur. Elle est celle qui mène aux paysages exceptionnels de la plaine des Cafres et du massif du volcan.
Une urbanisation au fil de la route des Hautes Plaines (RN3), qui monte vers la Plaine des Cafres. Elle compromet l’existence même du paysage de pente dans la mesure où elle tend à remettre en cause la perception du paysage.
Saint-Pierre, une ville tournée vers la mer, au patrimoine architectural remarquable et fragile
Saint-Pierre, ville coloniale dont le plan en damier libère des vues intéressantes sur le littoral et présente un patrimoine architectural de qualité. Cette ville pauvre en espace de nature et de respiration, ne présente pas de continuité écologique. Même les ravines sont effacées et dégradées.
Attrait de la ville de Saint-Pierre historiquement tournée vers la mer, cas unique à La Réunion. Confortement de la reconquête littorale par l’aménagement du port et d’espaces publics le long de la plage, profitant de l’ombrage des vieux badamiers de l’arrière-plage littorale.
Le passage du TCSP (Transport en commun en Site Propre) de la CIVIS a favorisé la recomposition d’espaces publics sur le pourtour de l’axe (place de la Poste, Gare routière et place du marché etc.) et permis de réinscrire la présence d’espaces de nature dans la ville. D’autres projets structurants en cœur de ville poursuivent cette dynamique : le parc des Berges (de la Rivière d’Abord), la requalification du parc de l’hôtel de ville etc.).
Plusieurs bâtiments témoignent du passé de la ville et sont dispersés dans le cœur de ville historique : l’Hôtel de ville, bordé d’un jardin avec fontaine et statues de la fin du 19ᵉ et du 20ᵉ siècle, l’hôtel de la sous- préfecture ou Villa Motais de Narbonne, l’ancien tribunal, la Médiathèque Raphael Barquissau, autrefois entrepôt pour le stockage des denrées et l’entrepôt Kerveguen « Maison Roussin ». Le marché couvert présente une structure métallique intéressante construite « entre 1856 et 1863 ». Deux demeures du centre-ville présentent une architecture remarquable : la Maison Orré du 19ᵉ siècle et la Maison Adam-de-Villiers du 18ème siècle.
Sur les pentes agricoles, le Domaine de Vallée à Bois d’Olive, caché par son jardin arboré et suggéré par la vieille cheminée et le vieux Domaine à la Ravine des Cabris, riche de nombreuses variétés de fruitiers…
Développement des zones industrielles et commerciales au-delà de la RN sur les belles terres agricoles littorales, interrompant la continuité visuelle sur les pentes cultivées.
Une plaine alluviale cultivée
Un puissant développement sur les pentes littorales autour de Saint-Pierre
Historiquement, le canal Saint-Étienne, long de 9 km a permis la mise en culture des pentes littorales et l’établissement de plusieurs usines dont celle de Pierrefonds. Le canal est aujourd’hui fortement dégradé, mais forme par endroit le support de liaisons piétonnes entre les quartiers. Les vestiges de l’usine encore présents sont aujourd’hui en ruine : la cheminée, l’usine, la place centrale et la maison de maître structurent encore ce lieu de mémoire.
Ces grandes étendues agricoles littorales à l’aval du canal Saint-Etienne sont largement menacées par le développement de zones d’activité industrielles et commerciales : zone industrielle 2, 3 et 4, au Sud de Bois d’Olive et au Sud de la Ligne Paradis et zone commerciale de Bank. Ces zones affichent des bâtiments imposants en façade de la RN2, participant à la fermeture visuelle sur les paysages remarquables des pentes du Dimitile et de Saint Louis. Le projet « Pierrefonds Grand Sud » sur les berges de la Rivière Saint-Etienne, sonne le glas des paysages de la plaine fertile agricole de Pierrefonds, et l’entité patrimoniale de l’usine. La ZAC Roland Hoareau, projet de développement économique d’intérêt régional, s’étale sur près de 87 hectares et se prolonge par la ZAD et la Plateforme de Développement Economique, Pierrefonds Village, une zone d’aménagement dédiée à l’habitat et aux équipements sur un périmètre de 70 hectares environ et l’Aéroport de Pierrefonds.
Créer une Zone Environnementale pour installer les outils multi-filières de valorisation des déchets, dont le développement est porté par ILEVA, et relocaliser les cimenteries et concasseurs de Bel-Air Saint-Louis (problématique sanitaire) et du secteur des Cheminées, ainsi que le centre de tri des déchets du bâtiment (STS).
Réaliser un accès depuis la RN1 passant sous le pont de la rivière Saint-Etienne, réservé aux camions du CTVD/outil multi-filières et aux camions des carrières.
Réaliser un plan de référence pour planifier la remise en état des terrains après l’exploitation des carrières.
Réaliser une route dédiée aux carriers.
Les paysages remarquables des pentes à l’approche de Saint Pierre s’effacent ainsi sous la pression galopante des zones d’activité ; de rares coupures visuelles sont préservées vers les pentes.
Des mi-pentes et pentes hautes encore cultivées, en voie de diversification, mais sous forte pression d’urbanisation
Si la canne domine largement dans les pentes basses, les cultures maraîchères sont de plus en plus présentes dans le paysage au fur et à mesure que l’on monte en altitude pour gagner en humidité. Elles dessinent des parcelles soignées remarquables, précisément tenues par les agriculteurs. Malheureusement le mitage dense et systématique d’une urbanisation d’habitat et de bâtiments agricoles médiocres dévalorise le paysage, ainsi que la présence d’anciennes friches colonisées par les mimosas (Acacia mearnsii, espèces exotiques envahissantes), historiquement développés pour la cuite du géranium.
Un étonnant paysage agri-urbanisé complexe s’offre ainsi largement sur les pentes du Tampon. Il ne se réouvre qu’avec les pâturages qui annoncent les hautes pentes du sud autour de Notre-Dame-de-la-Paix, vers le Bras Creux, les Tamarins et la Ravine Blanche.
Une reconquête littorale initiée sur une côte ventée et aride
Depuis la pointe de Ravine Blanche, des aménagements de loisirs légers et le sentier littoral cohabitent avec les grands équipements communaux (ancienne décharge réhabilitée, station d’épuration, aéroport…).
Au droit de l’aéroport, le sentier traverse un paysage sauvage et venté, offrant des ouvertures remarquables sur les pentes.
Le long de ce sentier, le littoral de Pierrefonds offre une belle représentation des habitats littoraux, constitués de pelouses et tonsures halophiles riches en espèces végétales rares (dont la lavangère, le veloutier de bord de mer avec la seule station connue à l’état naturel, l’indigo et la Chamaesyce du Gol…). Ces habitats sont aussi fréquentés ponctuellement par des oiseaux limicoles, et ce secteur constitue une zone importante pour les flux d’oiseaux marins (Puffins et Pétrels, entre leurs sites de reproduction dans l’intérieur de l’île et les zones d’alimentation, l’océan).
Deux rivières bordant la planèze
Enjeux et préconisations
Enjeux et préconisations
de préservation et de mise en valeur
Les espaces agricoles sous forte pression de l'urbanisation
- Protection contre l'urbanisation diffuse et l'extension des écarts. Phénomène qui banalise les paysages, fragilise l'économie agricole, surconsomme les terres cultivables, ne conforte pas le lien social, aggrave la dépendance à la voiture, coûte cher en réseaux et services à la collectivité.
- Préservation des zones agricoles au contact des zones urbaines : maîtrise de l'extension des zones d'activité industrielle et commerciale et des zones d'habitat.
- Limitation de l'impact des ouvrages industriels et meilleure insertion dans le paysage par un projet urbain et architectural adapté (lisières plantées...).
- Encouragement au développement d'une agriculture de proximité.
Les paysages agricoles diversifiés (cultures maraichères, pâturages, vergers...)
- Protection des terres sur le long terme contre l’urbanisation.
- Maîtrise paysagère et architecturale de l’habitat et des bâtiments agricoles, reconquête qualitative.
- Valorisation économico-touristique, développement de l'agri-tourisme, valorisation culturelle.
Les structures végétales remarquables dans l’espace agricole (alignements…)
- Protection des structures bocagères existantes sur la Plaine de Pierrefonds : ancien parcellaire agricole de l'usine, système de protection des cultures contre les vents…
- Replantations adaptées aux besoins contemporains.
Les paysages agricoles ou naturels littoraux (côtes rocheuses, plage, savanes, forêt littorale)
- Rares espaces naturels littoraux, dans l’ensemble appauvris et stérilisés du point de vue écologique. Seul le littoral de Pierrefonds présente des intérêts et des atouts écologiques qu’il convient de préserver voire de renforcer.
Les vues sur le paysage lointain, en particulier le Dimitile
- Identification des fenêtres, des perspectives, aux documents d’urbanisme, protection sur le long terme, (re) valorisation par enlèvement des panneaux publicitaires, effacement des réseaux aériens, aménagement de points d’arrêt...
Les coupures d’urbanisation, espaces de respiration
- Identification aux documents d’urbanisme, protection sur le long terme, (re) valorisation par enlèvement des panneaux publicitaires, effacement des réseaux aériens, aménagement de point d’arrêt...
Les espaces naturels des pentes (brandes, forêts)
Le patrimoine architectural urbain
- Identification et protection (aux PLU), soutien à la gestion et à la rénovation, développement de la sensibilité au patrimoine culturel architectural, paysager et urbain.
L’urbanisme végétal
- Préservation du patrimoine végétal public et privé, identification de trame paysagère aux documents d’urbanisme et protection, préalablement aux densifications.
Les centralités secondaires
- Renforcement par intensification : habitat, commerces, services, circulations douces.
Les routes paysages (ouvertures visuelles sur le grand paysage)
- Identification (aux PLU) des points de vue et valorisation paysagère : marquage des bords de route par la plantation d'arbres-signaux ou d’alignements, points de stationnement, le cas échéant aménagement touristique, culturel, pédagogique. Exemple : Pont d'Yves sur la D 27.
Enjeux et préconisations
de réhabilitation et de création
Les points de vue panoramiques, bords de ravines et liaisons douces peu valorisées
- Protection contre l'urbanisation des bords de rivières et ravines (mise à distance normalement prévue à minima au Code de l’urbanisme).
- Création de points de vue supplémentaires sur les rivières.
- Valorisation des bords de rivière par des aménagements simples permettant des liaisons douces entre les quartiers : les bords de la rivière d'Abord, la rivière Saint-Étienne.
- Valorisation patrimoniale et paysagère du canal Saint-Étienne, comme axe de liaison entre les quartiers.
Les voies d'accès et accueils des sites de nature
- Poursuite des aménagements entrepris : création de sentier littoral, recul des stationnements, résorption des points noirs, renaturation.
- Confortement de l'attractivité du paysage urbain littoral à Saint-Pierre : développement des déplacements doux et limitation de la circulation littorale…
- Réhabilitation du paysage littoral de La Pointe du Diable par des aménagements respectueux des sites et permettant l'accueil du public : valorisation paysagère et écologique du littoral, mise en valeur des vues remarquables sur les pentes vers l'amont.
- La Rivière d’Abord est un espace de grand potentiel qui mérite une requalification d’envergure associant le patrimoine historique et maritime à la ville de Saint-Pierre et de Terre Sainte.
Plusieurs projets sont à l’étude : aboutissement de la ZAC du Mail par un parc paysager sur la rive droite, rive gauche occupée par la ZAC Océan Indien… Une étude de programmation est lancée en 2022 sur la requalification du littoral de Terre Sainte et son interface avec le Port de Saint-Pierre.
Les zones industrielles et commerciales peu attractives
- Imposer une articulation du projet avec le paysage : implantation soucieuse du relief (éviter les effets de corniche de la ZI3), création de lisières arborées, espaces de perméabilité généreux, structures végétales accompagnant le projet (bassins, noues, haies, arbres…), etc.
Les centralités urbaines non affirmées
- Projet de développement urbain urgent à réaliser sur les pentes du Tampon : densification de l’habitat et centralité de façon à contenir l’urbanisation, les déplacements et organiser le devenir des terres cultivées.
- Confortement des centralités existantes ou potentielles, maintien de distances critiques minimales entre les bourgs.
- Cristallisation du développement, des commerces et des services, maillage des quartiers et opérations nouvelles par circulations douces, création de lisières agro-urbaines plantées aux marges des opérations, clarifiant les vocations des sols.
- Reconquête végétale et amélioration de la transparence écologique du centre-ville de Saint-Pierre.
- Revalorisation dans des dispositions moins routières et moins minérales des espaces publics de bourg : requalifications architecturales, redynamisation par le confortement des centralités.
Les limites non traitées entre les villes et l’espace agricole
- Création de limites agro-urbaines franches de façon à préserver les zones agricoles encore existantes : les pentes entre la Ravine des Cabris et Trois Mare, le bord du rempart du Bras de la Plaine entre la Ravine des Cabris et le Bras de Pontho, les terres entre lignes des Bambous et lignes Paradis. Concept de "parcs agricoles" pérennisés.
Les formes urbaines et architecturales non adaptées au contexte existant
- Maîtrise qualitative de l'habitat (architecture et paysage), encouragement à des dispositions architecturales et paysagères plus douces et plus durables. Identification et soutien à la requalification architecturale et/ou végétale des points noirs bâtis dans les zones urbaines ou sur les espaces de nature.
La RN 3 et l'urbanisation linéaire, les abords des routes
- Valorisation du paysage des pentes et préservation et mise en scène des fenêtres non construites sur le grand paysage : points de vue depuis la route des Plaines, lisières urbaines autour des agglomérations, plantation d'arbres d'alignement et réhabilitation de l'habitat (couleur…).
- Utilisation d'essences indigènes à privilégier et reconquête des bords de route aujourd'hui envahis par le troène, l'ajonc d'Europe, l'hortensia, et la persicaire de Chine.